
20 ans pour la Bergerie Caroline Pelletier
Depuis vingt ans, Caroline Pelletier est à la tête de sa bergerie, un héritage familial depuis cinq générations. Installée sur les terres de ses ancêtres à Saint-Damase-de-L’Islet, elle perpétue ainsi un savoir-faire agricole tout en modernisant ses pratiques pour assurer la viabilité de son exploitation.
José Soucy
Fille d’agriculteur, Caroline a grandi au milieu des brebis et des champs. Son père, présent à la ferme jusqu’à son décès en 2017, lui a transmis non seulement son expérience, mais aussi l’amour du métier. Pour elle, être éleveuse est un mode de vie exigeant qui ne laisse pas de place aux absences, qu’on soit malade ou non. Mais elle ne voit pas cela comme un sacrifice, car il s’agit davantage d’une passion qu’elle vit au quotidien. « J’ai passé toute ma jeunesse ici en compagnie de mon père. Les journées de congé, on n’en a pas ; c’est tout le temps comme ça, sept jours sur sept, mais moi, j’ai été élevée là-dedans. Et j’en garde de précieux souvenirs », dit-elle.
Son troupeau compte 210 brebis de race hybride prolifique, ce qui permet une reproduction tout au long de l’année. Contrairement aux anciennes fermes de subsistance, sa production n’est pas destinée à la laine, même si elle doit tondre les brebis. La bergerie produit de l’agneau de marché, avec une répartition de 50 % d’agneaux lourds et 50 % d’agneaux légers. Elle vend chaque année entre 350 et 400 agneaux destinés au marché de la viande.
Elle affirme par ailleurs que l’agneau du Québec est de meilleure qualité que l’agneau importé, comme celui de Nouvelle-Zélande, en raison notamment de son mode d’élevage plus contrôlé, et de son abattage plus jeune, ce qui rend la viande plus tendre et moins forte en goût. « Oui, les agneaux du Québec, ce sont les meilleurs », ajoute-t-elle en riant avec les étincelles dans les yeux.
Si elle consacre l’essentiel de son temps à son troupeau, Caroline Pelletier complète cependant ses revenus en travaillant dans la restauration les fins de semaine. Cette double activité lui permet d’investir dans son exploitation sans se verser de salaire régulier. « Heureusement, mon père m’a cédé la ferme à un bon prix dans le temps, parce qu’être dans le domaine agricole à notre époque n’est pas chose facile. Je n’aurais pas pu partir de rien dans ce domaine. »
Mme Pelletier ressent également une forme de déconnexion entre le monde agricole et le reste de la société, comme si elle évoluait dans un univers parallèle. Elle souligne qu’aujourd’hui, seules 42 265 personnes sont agricultrices, soit près de 0,47 % de la population du Québec, un chiffre en forte baisse par rapport au passé. Pourtant, la production agricole en général demeure stable, même si beaucoup de consommateurs ignorent les réalités du métier. « La majorité des gens ne réalisent pas le travail et les défis qui se cachent derrière les aliments qu’ils achètent en magasin. Ils arrivent à l’épicerie et n’ont pas conscience que derrière, il y a une production. »
Entre les coûts d’exploitation en hausse, les exigences administratives et la volatilité des marchés, les marges de manœuvre se réduisent. Pourtant, malgré ces contraintes, Caroline Pelletier continue de travailler dans ce domaine qui la passionne, convaincue que l’agriculture reste une pierre angulaire essentielle de la société. « Être capable de vivre de ce qu’on fait, c’est de plus en plus difficile. Mon rêve reste toutefois d’être autosuffisante et de bien en vivre », conclut-elle.

Caroline Pelletier, une passionnée de l’élevage ovin. Photo : José Soucy