Le printemps coule à flots

La saison des sucres bas son plein, mais les incertitudes liées au climat forcent les acériculteurs à rester sur le qui-vive jusqu’à la dernière coulée.

MARC LAROUCHE

« C’est une saison normale », explique Nathalie Lemieux, propriétaire de l’érablière qui porte son nom au Kamouraska. Chaque année, la période des sucres débute entre le 15 et le 20 mars, et s’étire sur un mois, parfois un mois et demi, lorsque dame Nature le permet. « Souvent, on peut se rendre jusqu’à la fin avril. Mais cette année encore, on reste prudent parce qu’on n’est jamais à l’abri des écarts de température », précise-t-elle.
Les conditions idéales, tout acériculteur vous le dira, reposent sur un fragile équilibre thermique : « Il faut que ça gèle la nuit, et que ça dégèle le jour. » Ces fluctuations permettent à l’eau d’érable de monter dans les érables le jour, puis de redescendre durant la nuit, assurant une coulée régulière. Les journées ensoleillées, les nuits froides, et même les chutes de neige contribuent à une bonne saison. Mais ces conditions deviennent de plus en plus imprévisibles. « Un 17 degrés au mois de mars, on n’en voit pas souvent. Et ça, ça change tout. »
Changements climatiques
L’impact des changements climatiques est bien réel dans les érablières de la région. Un redoux trop hâtif, ou une séquence de journées chaudes sans gel nocturne peuvent rapidement mettre un frein à la production. « Au 30 avril, on pourra vous dire si ça a été une belle saison ou non », dit-elle, prudente.
Malgré cette vigilance constante, Mme Lemieux arrive à savourer certains moments. « Quand on est dans le bois, entre les arbres, avec les grandes fenêtres autour de la cabane, oui, on en profite quand même. Il y a des petits moments plus tranquilles dans la journée. » Ces instants de calme dans le rythme effervescent de la saison sucrière permettent de se reconnecter à la nature et de goûter à l’ambiance si particulière des érablières québécoises.
À travers les chaudières qui débordent et les calculs de rendement, il y a toujours un brin de magie dans le simple fait de voir l’eau couler. Une magie qui, malgré les défis du climat, continue d’opérer chaque printemps au Kamouraska.

La saison des sucres bat son plein. Photo : Alain Bonnardeaux, Unsplash